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La princesse aux lys rouges

Lorrain Jean

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Jean LORRAIN (pseud. de Paul Duval), écrivain français né à Fécamp le 9 août 1855, mort à Paris le 30 juin 1906.La Princesse aux lys rougesC'était une austère et froide enfant de rois : seize ans à peine, des yeux gris d'aigle sous de hautains sourcils, et si blanche qu'on eût dit ses mains de cire et ses tempes de perles. On l'appelait Audovère.Fille d'un vieux roi guerrier toujours occupé de lointaines conquêtes, quand il ne bataillait pas à la frontière, elle avait grandi dans un cloître, au milieu des tombeaux des rois de sa race, et sa première enfance avait été confiée à des nonnes : la princesse Audovère avait perdu sa mère à sa naissance.Le cloître, où elle avait vécu les seize ans de sa vie, était situé dans l'ombre et le silence d'une séculaire forêt . le roi seul en savait le chemin, et la princesse n'avait jamais vu d'autre face d'homme au monde que celle de son père.C'était un lieu sévère, à l'abri des routes et des passages de bohémiens, et rien n'y pénétrait que la lumière du soleil, et encore n'y venait-elle qu'affaiblie à travers la voûte épaissie des feuillages des chênes.A la vesprée, la princesse Audovère sortait parfois hors de l'enceinte du cloître et se promenait à pas lents, escortée de deux rangs de processionnantes nonnes. Elle était sérieuse et pensive, comme accablée sous le poids d'un fier secret, et si pâle qu'on eût dit qu'elle allait bientôt mourir.Une longue robe de laine blanche à l'ourlet brodé de larges trèfles d'or traînait sur ses pas, et un cercle d'argent ciselé assujettissait sur ses tempes un léger voile de gaze bleue ou s'atténuait la nuance de ses cheveux. Audovère était blonde comme le pollen des lys et le vermeil un peu pâli des vieux vases d'autel.Et c'était là sa vie. Calme et le coeur empli d'une espérante joie, comme une autre eût attendu un retour de fiancé, elle attendait au cloître le retour de son père . et c'était son passe-temps et ses plus douces pensées que de songer aux batailles, aux périls des armées et aux princes massacrés dont triomphait le roi.Autour d'elle, en avril, les hauts talus se fleurissaient de primevères, ils s'ensanglantaient d'argile et de feuilles mortes à l'automne . et, toujours froide et pâle dans sa robe de laine blanche bordée de trèfles d'or, en avril comme en octobre, en juin ardent comme en novembre, la princesse Audovère passait, toujours silencieuse, au pied des chênes roux ou verts.L'été, il lui arrivait parfois de tenir à la main de grands lys blancs poussés dans le jardin du cloître, et elle était si frêle et blanche elle-même qu'on eût dit qu'elle était leur soeur. En automne, c'étaient des digitales qu'elle tourmentait entre ses doigts, des digitales violacées cueillies dans l'orée des clairières . et le rose malade de ses lèvres ressemb

Nombre de pages : 5

Date de publication :

Éditeur : Audiocité

Le studio Littérature

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