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Pantruche suite

Tristan Bernard

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Pantruche de Tristan Bernard 2°partie La Girafe, le Perroquet, la Sarigue et les deux Employés de la Compagnie des Omnibus FABLE Deux employés, « ayant un sur leur casquette », Un jeudi de l'Ascension, De la place de la Roquette, S'en vinrent au Jardin d'Acclimatation. C'étaient deux plaisantins de dangereuse espèce. Leur raillerie était épaisse. Ils accablaient les batraciens Avec des jeux de mots un peu trop anciens, Daubaient sur l'éléphant et sur le dromadaire. Nul animal n'était soustrait A ces lazzis sans intérêt Qu'eût récusés le plus stupide hebdomadaire. De vrai, quelque rustaud, natif de Barbizon, Son esprit fût-il mort et sa verve tarie, Eut moins vulgairement plaisanté l'otarie Ou nargué le morne bison. Ils vinrent jusqu'au parc ou Girafe, ma mie, Hausse son chef pensif et plein de bonhomie. « Oh! le sot animal! Mais à quoi donc sert-il? » Clamèrent d'une voix ces esprits terre-à- terre. Argument vraiment peu subtil Et bassement utilitaire. La girafe au long col ne leur répondit rien. Poursuivant leur chemin, les deux grossiers compères S'égayèrent encore aux dépens d'un saurien Et de trois paisibles vipères. Un perroquet ensuite excita leur humour. Puis, à la fin, ce fut le tour De sir Jack Kanguroo et de dame Sarigue. Ce flot d'absurdités sans digue, Même pour un indifférent, Etait tellement écoeurant Que dame Autruche, oyant cette racaille. Vomit le démêloir d'écaillé Et le trousseau de clefs qu'elle allait digérant. Le soir amène enfin la trêve. Pour rentrer au logis, le couple s'en alla. Or, il advint, qu'à quelque temps de là, Le syndicat vota la grève. Cocher et conducteur, contrôleur et côtier. Chacun se souleva. Descendant de son coche. Le cocher dignement rendit son fouet altier Et le conducteur sa sacoche. Les contrôleurs, d'un air grave de sénateurs, Rendirent leur sifflet d'ébène Et le petit machin que, d'un geste de haine, Ils enfoncent dans le papier des conducteurs. Or, à la préfecture, on n'en mène pas large. Monsieur Lépine est aux abois. De ce service urbain va-t il prendre la charge Avec le sergent Hoff et les gardes du bois ? Déjà, des voyageurs farouches Envahissent les bateaux-mouches. Mais ces bateaux, malgré leur bonne volonté, Ne peuvent atterrir devant la Trinité, Et ne desservent maintes rues Que dans les cas de fortes crues. Donc, nos deux compagnons, renommés tapageurs, S'en vinrent au matin, au parvis Saint-Eustache, Riant d'avance en leur moustache De l'émoi des sergots et des bons voyageurs. Mais leur surprise fut extrême. L'un des deux cria : « M... » et l'autre : « Caramba » Ce spectacle imprévu les rendit plus baba Que feu Ali-Baba lui-même. Un très vénérable éléphant Gonflait ses formes idéales Entre deux brancards, à l'avant De l'omnibus Ivry-Les-Halles. Venus de Belleville et du quartier Gaillon Des curieux faisaient une affluence énorme Tout autour de la plate-forme. Là, madame Sarigue, à l'oreille un crayon, Agitait de sa patte frêle Une sacoche naturelle Où tintait un joyeux billon. La st

Nombre de pages : 35

Date de publication :

Éditeur : Audiocité

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